LEÇONS D’AMOUR 2 : L’ÉROTISME DE LA TOXICITÉ

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by Luce deLire
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Read this essay in the original English in Issue 011: SLEEP.


Résumé : Peut-il y avoir de l’amour sans violence ? Luce deLire lie usage (de propriété privée) à l’abus (de pouvoir entre partenaires) et identifie la possessivité toxique et le contrôle entre partenaires intimes comme des symptômes du capitalisme. Elle soutient que la majorité de la culture populaire nous entraîne à méprendre la toxicité pour le paradigme de l’amour romantique : une condition qui trouve son prolongement entre partenaires intimes. Désapprendre la toxicité veut dire se détoxifier de la culture populaire. S’inspirant de la poète antique Sappho, elle suggère une autre alternative, une version anticapitaliste de l’amour romantique : le sublime indéterminé.

Ceci est la seconde partie de « Leçons d’Amour 1 : Flirtations Révolutionnaires, » par Luce deLire dans Stillpoint Magazine numéro 009 : TENDER (2021).


I’m just trying to help you
(But you don’t trust me) …

– Alice Glass, Fair Game

[J’essaie juste de t’aider
(Mais tu ne me fais pas confiance)…]

« Il n’y a rien de plus romantique que d’en faire tout un cinéma inutilement ! » Une certaine nuit, dans un certain bar, dans une certaine ville d’Europe du Nord (Berlin). György est clair : « Que serait l’amour sans sacrifice ? Et sans le spectacle qui l’entoure ? » Cela me paraît toxique. Je suggère une distinction : et si l’on faisait la différence entre sacrifice négatif et positif ? Ce que je veux dire est que parfois on sacrifie des choses, ou soi, au nom de quelqu’un ou de quelque chose, pour qu’on ne les perde pas, en ne se transformant pas trop – juste en quelque chose que l’on voulait devenir de toute manière. Et parfois on sacrifie des choses qui, alors, manquent : parfois le sacrifice fonctionne dans le registre de la propriété privée, dérobant quelque chose qui nous appartenait. Et parfois, le sacrifice fonctionne dan le registre de l’hospitalité : partager quelque chose pour le bien commun. Parfois, autrement dit, on dédie notre amour et notre affection à une personne particulière au prix de nos amis, notre famille, notre temps pour soi et les choses que l’on aime faire. Et parfois on dédie son amour et son affection à une personne particulière de manière à ce que nos autres intérêts et relations en bénéficient. Parfois, plus précisément, nous nous partageons et parfois nous somme pris, possédés. Parfois le sacrifice est romantique, et parfois le sacrifice est toxique. Le sacrifice romantique permet au sacrifié de s’épanouir alors que le sacrifice toxique handicape cette personne, l’empêchant de faire des choses, et prend possession d’eux comme d’une propriété privée.

« Comme dans Roméo et Juliette ! » s’exclame György. « Roméo et Juliette se dévouent leurs vies pour l’un et l’autre dans un acte de partage absolu ! » C’est vrai, Roméo et Juliette est probablement l’exemple paradigmatique de l’amour romantique dans le monde occidental. L’idée de l’histoire est que deux adolescents du XVIe siècle, provenant de clans ennemis de Vérone, en Italie, tombent amoureux et finissent par se suicider à cause de circonstances malheureuses, d’un manque de communication et de l’oppression politique. Cet exemple de sacrifice est toujours considéré comme une forme paradigmatique de l’amour romantique de nos jours : une dédication absolue où l’on se donne entièrement l’un à l’autre. « Mais penchons-nous sur le texte de plus près, pourquoi se tuent-ils exactement ? » Alors que nous nous penchions tous les deux sur mon écran cassé à la lumière des chandelles, faisant défiler un texte numérisé vieux de 350 ans, mon intuition se révéla être exacte : après avoir mépris le sommeil de Juliette pour sa mort, Roméo se sacrifie par jalousie1. Il croit que la mort s’est éprise de Juliette. Le sacrifice de Roméo n’est alors pas un présent pour le bien de Juliette. Plutôt, c’est un acte de défi à l’encontre d’un autre « amoureux » – la mort. C’est un acte d’hostilité plus qu’un acte d’amour.

Le barman, que je connais par coïncidence d’un autre espace-temps, nous offre une tournée en s’exclamant : « Ah vous voilà… ! » « Santé ! » répondons-nous et retournons au texte.

« Qu’est-ce que Juliette a à dire lorsque c’est son tour de mourir ? » Je m’interroge. Sa réponse : « Oui, du bruit ! Hâtons-nous donc ! Ô heureux poignard ! voici ton fourreau… Rouille-toi là et laisse-moi mourir ! » Shakespeare écrit la version féminine de la mort romantique de manière à ce que la protagoniste n’a même pas le temps de nous dire pourquoi elle doit mourir. Son existence s’évapore, pulvérisée entre un groupe de garçons – des structures familiales oppressives, les persécuteurs en chemin, un mari jaloux et un poète patriarcal (Shakespeare). Tout cela me paraît un sacrifice toxique. György est d’accord : « Pour l’amour, quelque chose doit mourir – même si ce n’est qu’une putain de fleur. »

Comment se fait-il que l’histoire d’un double suicide d’adolescents, l’un motivé par la jalousie, l’autre effacé par l’oppression patriarcale, est toujours considéré comme l’apogée de l’amour romantique ? Qu’est-ce que l’amour romantique pour qu’une tragédie puisse devenir un exemple paradigmatique positif ?

Dans son célèbre « fragment 16, » la prêtresse de l’amour lesbien Sappho (vers 630-570 av. J.-C.) nous livre des indices pour répondre à cette question2. Pour Sappho, voir l’être aimé et regarder deux camps se livrer bataille ne sont pas contradictoires ; ces expériences ont différentes valeurs sur un spectre esthétique. Elle soutient que n’est pas qu’observer une bataille n’est pas une expérience esthétique. Son argument est que la vue de son amante lui donne une expérience esthétique plus forte que de voir des gens s’entre-tuer dans une bataille. Quelle est donc cette expérience esthétique qui s’applique à l’amour et à la guerre, et à la béatitude romantique et au chaos meurtrier ? Mon hypothèse : amour et guerre sont connectés par une expérience d’infini sans engagement direct.

M’appuyant sur une longue tradition d’esthétique philosophique, j’appelle l’expérience d’un tel infini le sublime. Je dis que cette expérience approche l’infini car cette chose que l’on observe n’a littéralement pas de limites, ou tout du moins une limite qui ne peut être déterminée. La ville de New York vue depuis l’Empire State Building s’étend au-delà de l’horizon et on peut très bien l’imaginer s’étendre à l’infini. Amour et guerre, affection et violence peuvent causer cette expérience : d’un côté voir l’écrasant infini de la violence ou la promesse de celle-ci dans une armée ; de l’autre être confronté à l’infinie beauté d’une amante. Lorsque les amants se regardent les yeux dans les yeux indéfiniment ou conversent sans fin, ils connaissent ce que j’appelle le sublime romantique. Et pourtant, le sublime romantique n’est pas l’exemple paradigmatique de l’amour romantique dans les sociétés occidentales. L’idée, dans Roméo et Juliette, n’est pas que les protagonistes ne sont pas éternellement captivés par les yeux de l’un et de l’autre mais que, devant l’impossibilité de leur union, ils se suicident. Alors que pour Sappho, notre confrontation avec l’infini est plus proche et intime dans l’amour que dans la guerre, chez Shakespeare, une certaine dimension d’amour violent occupe le devant de la scène. À la différence du sublime romantique chez Sappho, Shakespeare use du sublime toxique : une confrontation avec l’éternité (dans le sens d’une durée infinie) de la violence (mort, suicide), couplée avec l’infini de l’amour (en tant que désir qui littéralement transcende la vie).

L’érotique de la toxicité consiste dans la sublime expérience des terreurs tenues à distance sans crainte de leurs conséquences. Tout comme l’est observer un orage par une fenêtre vitrée, les signaux d’alarme peuvent être amusants à regarder jusqu’au moment où ils frappent : nous ne sommes supposément pas engagés, nous regardons simplement le drame se dérouler et nous apprécions le spectacle. C’est ce qui nous arrive dans Roméo et Juliette : nous sommes attirés par le spectacle précisément car nous n’en faisons pas partie. Si c’était notre amant(e) ou notre fille qui mourrait, nous nous débattrions, hurlerions et connaitrions une peine atroce. Pourtant, derrière le quatrième mur, assis confortablement et protégés des effets de la catastrophe qui se déroule sous nous yeux, nous pouvons savourer le spectacle. Et alors que le drame se produit et que la fin n’est pas encore en vue, cette catastrophe apparaît infinie, un puits de tristesse sans fond. L’amour dans sa forme dramatisée, publiée, est plus souvent que jamais conçu précisément autour du sublime toxique ; avec Roméo et Juliette, dans ce sens, un exemple parmi tant d’autres. Et par là, nous sommes entraînés, habitués à méprendre la toxicité pour de l’amour romantique.

Le sublime toxique, pourtant, n’est pas restreint à des scénarii fictifs. Il fait partie de la mécanique de relations toxiques réelles tout comme il est constitutif de l’abus de substances. D’un point de vue esthétique, plus vous vous trouvez près du spectacle qui se déroule sans vous y engager, plus intense sera l’expérience (le tourisme aux destinations dangereuses et les zoos suivent la même logique – pensez au documentaire Tiger King). Le sexe maximise cette proximité à une réalité dangereuse. Plus vous vous rapprochez, plus il est probable que le quatrième mur se brise, et que vous deveniez un acteur plutôt qu’un spectateur, que vous soyez déjà conscient d’être le sujet de violences ou non. Regarder Roméo et Juliette peut paraître bénin. Mais rapprochez-vous de l’action… à quel moment est-ce que le manque de volonté de votre partenaire possessif(ve) à chercher des soins professionnels pour leurs problèmes de colère, dépression ou anxiété, devient-il une prison émotionnelle ou une menace physique ? Quand est-ce que l’instabilité émotionnelle et la projection d’expériences traumatiques de l’enfance transforme dépendance en repossession violente de propriété ?

Mon argument est que, visiblement éloignée, l’expérience esthétique de la violence constitue elle-même un aspect de toute relation toxique, que ce soit avec des partenaires romantiques, des parents ou des substances addictives : nous nous croyons plus loin d’eux que ce que nous sommes en réalité. C’est ce qui constitue l’érotisme de la toxicité : un effet de vertige émotionnel. D’un côté, le déni de la réalité violente permet une expérience esthétique particulière : le sublime toxique ; de l’autre côté, ce même déni permet à une relation toxique de s’épanouir car il projette l’illusion qu’on y est toujours dehors, aux commandes, alors même que les limites d’une zone de guerre émotionnelle ont été franchies il y a longtemps déjà. Une fois fascinés par la relation toxique, les gens sont souvent trop captivés par l’interminable (infinie) offensive de bagarres, disputes et l’urgence de considérer une séparation, chercher de l’aide, ou se rendre compte d’être victime de violences en premier lieu. C’est la magie du sublime toxique : votre propre aliénation est le carburant qui vous fait persévérer. Par moments, cela vous permet de sentir une étrange sensation de joie à travers l’attention décousue de psychologues et d’amis, un sens de gratification à l’égard de la condition infinie votre propre souffrance. Cette sensation est le sublime toxique. Sappho avait raison : d’un point de vue esthétique, amour et guerre existent sur un spectre. Parfois, vous pouvez être pris sur une pente glissante entre les deux. Parfois, ils devinent indifférentiables. La pente glissante et l’indifférenciabilité de l’amour et de la guerre sont activés par la domination du sublime toxique dans les films, chansons, pièces de théâtre, etc. La culture populaire répète en boucle le spectacle d’une relation esthétique avec l’amour violent, que nous subissons de manière désengagée. Dans la mesure où cette relation esthétique constitue les relations amoureuses violentes elles-mêmes, il l’est de même leur circulation dans les médias. C’est ce plausible déni de violence dans de telles relations qui permet cette violence avant tout. Et c’est le sublime toxique, célébré, idéalisé et répété dans la culture populaire – de Roméo et Juliette de Shakespeare à Blinding Lights par The Weeknd en passant par Someone Like You d’Adele ou The Queen’s Gambit et autres – qui facilite un tel déni aussi bien que l’illusion de détachement et de contrôle relatif. Si vous voulez désapprendre la toxicité, vous devez vous désintoxiquer de la culture populaire.

POURQUOI LE SUBLIME TOXIQUE EST DEVENU LE PARADIGME DE L’AMOUR ROMANTIQUE?

« Est-ce que tu fumes ? » me demande György. Peut-être aujourd’hui. « Pourquoi donc ? » Je prends une cigarette de son paquet. « C’est le capitalisme. » Pour ma part, les fondations idéologiques du capitalisme sont basées sur l’idée de propriété privée en tant que manifestation de liberté négative. Liberté négative veut dire absence d’interférence extérieure : être libre d’impôts veut dire que les impôts n’interfèrent pas avec mon salaire, liberté de mouvement veut dire absence d’interférences avec ma position physique (comme un mur ou des restrictions de mouvement), etc. D’un point de vue idéologique, la propriété privée est une manifestation de liberté négative dans un objet3. Car apparemment, la propriété privée est réservée exclusivement pour votre usage personnel, alors que le reste du monde en est exclu. Mon matcha latte et mes robes transparentes sont miens et moi seule décide si, comment et quand ils vont être utilisés. C’est l’idée de la propriété privée ; personne ne peut vous dire qu’en faire ; cela dépend de vous et seulement vous. Maintenant, deux aspects centraux de la toxicité sont la possession et le contrôle. La toxicité est, alors, seulement une forme d’amour en tant que possession. Elle transforme l’objet du désir en objet de propriété privée, par défaut interdite de jouissance (ou contrôle) par quiconque à part une personne, qui crucialement n’est pas la personne possédée4.

Plus loin encore, le capitalisme encourage l’application du principe de possession privée aux relations amoureuses en encourageant un comportement narcissique, une ressource majeure de la toxicité. Car le monde capitaliste est constitué de relations de possessions privées qui veulent dire : pour chaque chose que vous rencontrez, ce qui importe est si cela vous appartient ou pas. Vous vous comportez différemment avec vos affaires, vos amis et vos amant(e)s et différemment avec les affaires, amis et amant(e)s, etc. des autres. La présence constante de cette distinction fondamentale dans l’univers du social nous habitue à nous comprendre comme centraux dans le monde social. Il importe si cela nous appartient ou pas. Mais seulement, ou spécifiquement, lorsque des choses ne nous appartiennent pas, elles ne nous appartiennent pas, à nous en particulier. Ainsi, la propriété privée des autres nous parle négativement. Elle nous dit : « Ne vous approchez pas de moi. Ne me touchez pas. Ne me cassez pas. »

De la myopie du concept de propriété privée au narcissisme pur, il n’y a qu’un petit pas. La narcissiste se prend pour la destinataire, l’arbitre et le sujet de toute et chaque chose autour d’elle. Pourtant, elle comprend aussi que le monde ne tourne pas entièrement autour d’elle. Elle doit alors faire tourner le monde autour d’elle. Cela peut se faire par performance scénique : elle peut se déchaîner si vous n’êtes pas disponibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 ; elle peut être blessée si vous n’arrivez pas à lire ses pensées ; elle peut constamment se comparer à d’autres de manière peu flatteuse ou elle peut penser qu’elle peut tenir encore une semaine, un mois, une année dans cette relation catastrophique, cet emploi horrible, ce pays qui tombe en ruines, faisant de tout, de ce fait, une question de ses compétences et non des conditions générales.

Ou bien, il se peut qu’elle utilise des fantaisies paranoïaques pour potentiellement croire que tout et n’importe quoi gravite autour d’elle, et le prendre comme un fait avéré. C’est ici que la jalousie se tapisse : dans la surdétermination de petite occurrences particulières à des fins particulières – infidélité, tromperie, séparations, etc. Je ne dis pas que le capitalisme cause simplement paranoïa, toxicité et narcissisme, mais plutôt que le capitalisme encourage paranoïa, toxicité et narcissisme. C’est parce que le concept de propriété privée encourage une compréhension du monde à travers la distinction moi/pas-moi, mien/pas-mien, ce qui essentiellement situe l’individu et ses biens au centre de l’univers. Dans ce sens, alors, le capitalisme cause le sublime toxique à devenir paradigme ou tout du moins de manière intermédiaire.

Tout, toute action, toute relation, sera changée en bien et employée à produire une sorte de profit. Généralement, tout problème, toute crise, tout dégât a besoin d’un remède. Sous le capitalisme alors, tout remède peut potentiellement devenir propriété privée et telle propriété engendre des dépenses si vendue. Et là où il y a dépenses, il y a accumulation de capital. Ainsi, le capitalisme n’a aucun intérêt à voir les choses s’améliorer. En fait, le capitalisme a un intérêt perpétuel à perpétuer la misère, vendre plus de fleurs coupées pour rabibocher les blessures passées, plus de thérapie de couple, plus de relations passagères post-séparation, plus de séances de gym qui vous donneront ce corps de revanche lorsque vous essayerez après votre dernière tragédie toxique pour qu’alors vous pourrez, finalement, vous sortir de ce bourbier qu’ils vous font appeler vie5.

En bref, le capitalisme néoliberal a pour intérêt primaire la génération de profit. L’entière machinerie qui y est liée est de manière inhérente, coloniale. Les centre d’appels sont délocalisés dans les pays du Sud où ils exploitent des gens de couleur pour des services 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour les pays du Nord, et des parts importantes de la production ont lieu dans d’anciennes colonies, où elles bénéficient des régimes de domination et de contrôle établis. Des pratiques comme le yoga et la méditation, employées comme antidotes aux relations toxiques, sont souvent des versions nivelées par le bas de pratiques locales dans des actes d’appropriation culturelle. La primauté de la valeur ajoutée cela dit, installe à travers le capitalisme néolibéral un intérêt systémique à garder tout le monde à se coltiner un niveau de stress maximal et joie minimale, afin de maximiser les dépenses et minimiser la résistance. Le capitalisme néolibéral a donc plus grand intérêt dans le sublime toxique que dans le sublime romantique, simplement parce qu’il profite plus de catastrophes qu’il ne bénéficie du bonheur. Et par là, le capitalisme encourage le sublime toxique : il exploite une possible tendance vers le sublime toxique comme une confrontation avec le double infini (amour et violence) afin de maximiser la valeur ajoutée.

Si mon raisonnement est correct, alors en fait, à travers les relations toxiques, nous souffrons du capitalisme. C’est l’intrusion du concept de propriété dans les secteurs les plus intimes de nos relations sociales, la marchandisation de l’amour lui-même, qui se traduit dans les douleurs/maux de la possessivité, du contrôle émotionnel et des traumas induit par la maltraitance. Ici, plutôt que d’être compris de manière abstraite, la nature oppressive du capitalisme peut être ressentie. En conséquence, l’ennemi n’est pas la personnalité narcissiste (votre ex, votre mère, votre co-locataire). L’ennemi est le capitalisme. Le narcissiste est seulement un intermédiaire à travers lequel le capitalisme vous fait face de la manière la plus intime, avec la violence du concept de propriété, par le chemin du patriarcat blanc cis-hétéro.

Individualiser le problème en idéaux-types et histoires tragiques, cela dit, nous détourne de la nature systémique de la violence entre partenaires intimes. Les séances de psy, permanences téléphoniques, conseils d’amis, une culture populaire qui accueille les âmes tourmentées de ceux qui souffrent de violences, une machinerie culturelle qui encourage la sensibilisation atour des relations toxiques, et des médias sociaux qui consolent le soi maltraité sont tous importants. Cela dit, sans anticapitalisme, ce sont juste des moyens de profiter de la nature nuisible de la propriété privée comme forme de vie sans changer la nature du système. Sans anticapitalisme, je vous le dis, vos chansons et séries Netflix favoris ne sont rien que des champs d’exercice pour le déni d’une vie de misère.

Pire encore, les contes d’amour toxique fonctionnent en normalisant l’amour privatisé au-delà de ses manifestations violentes : les couples partagent habitudes, pratiques, espaces, temps et propriété entre eux. « Être un couple » est en fait défini par l’exclusion des autres de ces pratiques partagées – chats, voitures, enfants, cafés, comptes Netflix, voyages du weekend, apéros, sont tous des exemples d’amour moulé par la propriété privée. Les frictions constantes autour de la responsabilité, la confiance et l’accès aux espaces et temps de l’autre sont des symptômes de cette marchandisation de l’amour au XXIe siècle6. La toxicité est seulement l’extrémité d’un spectre de l’amour comme propriété privée, qui suit la même logique toxique bien qu’il ne débouche pas automatiquement sur de la violence. Cela dit, abolir le capitalisme n’éradique pas la toxicité par soi-même. Le patriarcat, le racisme, la mentalité coloniale et bien d’autres facteurs jouent un rôle. Pourtant, sans anticapitalisme, il n’y aura jamais d’amour au-delà de la violence.

Il y a une autre cause expliquant la paradigmaticité de l’amour toxique auquel le capitalisme s’accroche. Alors que le romantique sublime de Sappho préfère l’infini de l’amour à l’infini de la violence, le sublime toxique est une confrontation à la violence illimitée en même temps qu’à l’amour infini. Il paraît que le sublime toxique soit le plus fort, puisqu’il implique une double infinité : l’infini de l’amour et celui de la violence. Notons qu’il importe peu que nous parlons de vrai infini ou bien juste d’une indétermination, d’une indéterminabilité, ou de l’impression d’une continuation sans fin. L’expérience est toujours celle d’un infini, peu importe combien cet infini est réellement concrète.

Cela dit, si nous voulons que l’expression de l’amour concorde avec le niveau de nos sensations ressenties, nous pourrions être tentés de prendre la double-infinité du sublime toxique comme en étant une expression plus adéquate que le simple infini du sublime romantique. Ce besoin d’égaler l’intensité des sensations avec l’intensité de leurs expressions se reflète dans la logique du sacrifice avec laquelle cet essai a commencé. « Les amoureux veulent des sacrifices, » dit György, « parce qu’autrement, comment y croiraient-ils ? Les dieux mythologiques voulaient que des animaux meurent. Et par analogie, les amoureux d’aujourd’hui ont besoin de voir leurs partenaires se dévouer pour eux. Tout comme les croyants ont besoin de montrer leur dévotion religieuse, les amoureux veulent afficher leur dévouement romantique. » L’amour, dès lors, est vraiment une mauvaise religion.

In blue light a white man with beard and swept back hair licks a large knife

COMMENT EVITER LE PIÈGE DU SUBLIME TOXIQUE ?

Si nous voulons désapprendre la toxicité, nous devons nous détoxifier de la culture populaire. Et alors quoi ? L’incongruence qu’on a décrit entre sensation et expression, entre réalité et intelligibilité de l’amour, est à la fois une ressource prête à être exploitée par le capitalisme et un réservoir de résistance à son encontre. Une des raisons pourquoi Roméo meurt d’une mort violente est sa jalousie, mais une autre est qu’il méprend le sommeil pour la mort. Juliette n’avait pris qu’une forte dose de somnifères afin d’échapper à sa famille et se réveille alors, pour rejoindre Roméo plus tard. Roméo, cela dit, croit au subterfuge comme presque tout le monde. C’est alors précisément cette indétermination, cette indécision sur la signification, sur l’intelligibilité, qui le pousse à mourir. C’est parce que Roméo ne peut pas différencier sommeil et mort et prend ce qu’il voit pour ce qu’il croit, qu’il commet un tragique et inutile suicide.

La raison de la mort de Juliette, toutefois, est encore plus indéterminable que celle de Roméo : « Oui, du bruit ! Hâtons-nous donc ! Ô heureux poignard ! voici ton fourreau… Rouille-toi là et laisse-moi mourir ! » Meurt-elle sur un coup de tête ? Est-ce qu’elle veut éviter que Roméo ne la trompe avec une mort féminine, tout comme Roméo veut éviter qu’elle ne le trompe avec une mort masculine ? Essaie-t-elle de s’échapper vers le paradis lesbien ? On ne sait pas. Dans les deux cas, l’indétermination de l’intelligibilité inhérente, que ce soit par perception (dans le cas de Roméo), ou par signification (dans le cas du silence de Juliette), ou par expression artistique (dans le cas de l’écriture clairsemée de Shakespeare dans cette scène) constitue la mort que l’on voit.

Dans les deux cas, cela dit, la mort sert à déterminer l’indéterminé : Roméo prend l’état de Juliette pour « mort » et non « sommeil. » Juliette ne prend pas le temps d’exprimer ses pensées, ou Shakespeare ne la laisse pas faire, suffoquant l’indéterminée raison de sa mort dans l’acte. Le suicide résout ces indéterminations en détermination sans équivoque : la fin irrévocable de l’existence des protagonistes. Il y a aussi une seconde indétermination que ces morts résolvent. Elles réconcilient l’incongruence entre sensations et expression, entre la réalité (ressentie) de l’amour et son inintelligibilité vue de l’extérieur. C’est exactement cette indétermination qui a poussé György à suggérer le sacrifice comme modèle de l’amour romantique en premier lieu. « Il n’y a pas plus romantique que d’en faire tout un cinéma inutilement » car précisément le spectacle signifie ce qui autrement n’a pas de réalité en-dehors de l’expérience immédiate de l’amoureux. Le spectacle inutile transforme l’intelligibilité en une réalité interne. Je ris à l’écoute de son expression géniale, signifiant la joie de réfléchir – et de l’amitié. Réflexion excessive demande externalisation. Alors on boit encore un verre. L’indétermination est insoutenable.

Rappelons-nous : le sacrifice romantique permet à la personne se sacrifiant de s’épanouir, alors que le sacrifice toxique handicape cette personne, l’empêchant de faire des choses, et prend possession d’eux comme d’une propriété privée. Cela dit, comment décider quand un sacrifice est réellement romantique ou réellement toxique ? En fait, il y a tout un tas de facteurs en jeu, comme les sentiments individuels, les normes sociales, ressources émotionnelles, le jugement de nos proches, etc. Aucun de ces facteurs ne peut déterminer entièrement la nature du sacrifice en question. Ce qui fait du bien maintenant peut avoir été la phase préparatoire d’un attachement traumatique le plus total. Ce qui semblait une faveur temporaire pourrait être bientôt un arrangement permanent. Et ce qui semblait une norme sociale pourrait se trouver être la goutte de trop qui vous permet de vous extraire de quelque chose dont vous ne vous souvenez pas avoir accepté en premier lieu.

Pourtant, sous tout cela, l’indétermination entre intelligibilité et réalité empêche une ultime, définitive décision sur si quelque chose est toxique ou romantique. Car tout ce qu’on peut dire sur la réalité en général doit être exprimé à travers son intelligibilité, par les moyens à travers lesquels elle est perceptible. En revanche, l’intelligibilité doit être l’intelligibilité de quelque chose – une quelconque réalité. En ce sens, la relation entre réalité et intelligibilité et constitutionnellement indéterminée, c’est-à-dire qu’elles sont tellement entremêlées que nous ne pouvons pas les différencier, alors qu’il doit y avoir quelque distinction minimale entre elles. Comment peut-on décider si un sacrifice est vraiment romantique ou vraiment toxique ? On ne le peut pas. Au finale, quelqu’un doit apposer sa signature, prendre une décision, rester à subir, ou s’en aller. Cela dit, souvent le moment de s’en aller n’est atteint que lorsque cette indécision l’emporte sur des accords tacites, quand les questions sur le sens de cette action ou d’une autre (de cette expression ou d’une autre) devient indéchiffrable et se met en travers du chemin de tout le reste. C’est le point de décision violente.

D’un côté, alors, la toxicité est le paradigme de l’amour dans les sociétés occidentales. Car il exprime une double infinité (d’amour et de violence) qui paraît plus adéquate pour décrire la sensation d’amour perçue que l’infini simple de l’amour romantique. Cette double infinité est exploitée systématiquement par le capitalisme, qui la tourne en une mécanique transformant les relations sociales en relations de possession, afin de produire de la valeur ajoutée, et simultanément nous détourne de ses conséquences désastreuses en moulant l’oppression systémique dans l’apparence des relations individuelles et problèmes privés. De l’autre côté, le romantique et le toxique ne peuvent pas, en pratique, être complètement discernés. Il se trouve une indétermination entre partager soi et être transformé en propriété privée, entre quelque chose qui paraît bien et quelque chose qui est bien, entre quelque chose qui paraît fou et quelque chose qui est fou.

Que peut-on faire ? Nous avons vu comment le capitalisme prend avantage d’un désir d’exprimer l’intensité du sentiment d’amour à travers la double infinité du sublime toxique (amour et violence). Pour commencer, nous aurions alors besoin de quelque chose qui peut transformer ce désir tellement matériel d’exprimer l’amour de manière adéquate, en un moyen d’émancipation à partir d’un portail vers l’exploitation. Là, Sappho peut nous aider.

Souvenez-vous que le « fragment 16 » est un fragment. La réalité du concept d’amour chez Sappho reste alors indéterminé. Nous pourrions nous embarquer dans un projet exégétique pour déterminer sa vraie théorie de l’amour (et nous devrions le faire !). Cela dit, il se peut que nous ne trouvions pas de réponse absolue. Dans Roméo et Juliette, l’indétermination entre sommeil et mort provoque un double suicide. Dans le poème de Sappho, l’indétermination peut être lue comme une cause pour une autre expérience du sublime, une confrontation particulière avec l’infini, le sublime indéterminé :

L’esprit inflexible
… sans peine… ce qu’elle entend
… évoquant pour moi…
Anactoria absente […]
Impossible… de se produire
… humaine, mais de prier pour une part
… et pour moi-même

La sublimité consiste en cette expérience d’indétermination entre les différents concepts d’amour. À qui est cet esprit inflexible ? Qu’est-ce qui évoque le souvenir de son amante Anactoria à Sappho ? Qu’est-ce que Sappho envisage de partager – à qui en dehors d’elle ? Qu’est-ce qui marque les limites de l’amour et est « impossible … de se produire ? » Est-ce peut-être la détermination de la réalité de l’amour, incluant une théorie de ce qu’est l’amour et comment il fonctionne ? Cela dit, les indéterminations relevées ci-dessus, les parties manquantes du poème, produisent un certain infini. Ici, le nombre des différents concepts possibles de l’amour articulés dans le poème de Sappho ne sont pas déterminés. Ils ne peuvent être limités à deux, cinq ou cinquante. Tout dépend de ce que vous placez dans les blancs. D’un point de vue technique, le nombre de concepts de l’amour que ce poème rend possible est infini. Compris de ce point de vue-là, la confrontation avec le fragment de Sappho permet une infinité de connections entre l’intelligibilité et la réalité de sa théorie de l’amour. L’expérience de cette infinité, sans être menacée par cette dernière, est une expérience du sublime indéterminé. Cette expérience n’insisterait pas sur un idéal amoureux ou un autre mais plutôt à savourer la réalité matérielle de l’amour, à savoir le papier déchiré, l’histoire non terminée, et les éléments d’incompréhension particuliers. Ce serait s’engager dans le processus d’assembler un puzzle qui ne peut être assemblé. Ce serait être ébahi par le fait que, en dépit d’une infinité de théories possibles, nous pouvons toujours entrer en conversation sensée avec cette personne, Sappho, qui est morte il y a plus de 2500 ans.

Les amours que l’on vit ne sont-ils pas des fragments, tout comme le poème de Sappho ? Ces amours paraissent être des puzzles impossibles à assembler, des processus sans fin condamnés à échouer. Et pourtant, nous pouvons nous engager dans un processus collectif avec, et à travers, et à propos de ces puzzles, peu importe leur incomplétude constitutionnelle et l’infinité de leurs possibles combinaisons. Est-ce que le sublime indéterminé pourrait être un modèle alternatif pour une expression de l’amour ? Si oui, cet amour pourrait prendre un plaisir esthétique dans l’infini, l’indétermination articulée à travers la connexion intime à portée de main. Cet amour n’essaierait pas de résoudre l’indétermination en la suffoquant ou en trouvant une solution institutionalisée (comme le mariage ou la mort). Ressentir le sublime indéterminé signifie vivre dans le problème d’intelligibilité/réalité, sans peur, avec une appréciation pour l’indétermination, et pour comprendre les choses ensemble. Le sublime indéterminé exprime d’un côté l’infini de l’amour ; de l’autre, l’indétermination entre réalité et intelligibilité possède son propre infini : l’infini de la création de sens collective qui nous transporte de la simple intelligibilité à la réalité et vice-versa, le processus partagé et interminable de faire sens du monde et de nous. Le sublime indéterminé abrite alors un double infini qui rivalise le sublime toxique. Pourtant, il implique une création de sens collective qui surmonte l’amour-propriété et son insistance à posséder et contrôler. Le sublime indéterminé possède dès lors un potentiel anticapitaliste inhérent. Alors que nous nous levons, György insiste à payer l’addition. Que puis-je faire…

Maintenant que nous avons un paradigme amoureux alternatif, que faisons-nous ? Nous devons former des institutions sociales qui perpétuent le sublime indéterminé et aident à le répéter : films, podcasts, chansons, pratiques sociales et institutions. C’est là que vous entrez en jeu. Tout comme tout amour individuel est un fragment, infini dans son incomplétude constitutive, tel est l’amour en tant qu’expérience du sublime indéterminé. C’est à nous, à vous de fournir des exemples, des histoires, chansons, films, institutions sociales, des lois et tout ce qui paraît utile pour illustrer et exposer, projeter et présager, pré-promulguer, interroger, et se languir de l’amour en tant qu’expérience du sublime indéterminé. Mais c’est une autre histoire pour une autre fois, d’autres histoires… à être contées par d’autres.

Merci à: György Jellinek, Alaida Hobbing, Selim Hotinli, Anne Marie Wirth Cauchon, David Peterka, Ryan Warwick, Isabel de Sena, Liana Georgi, Menachem Kaiser, Herr Lindemann, Nathanja et Heinrich.


1 « Dois-je croire que le spectre de la Mort est amoureux et que l’affreux monstre décharné te garde ici dans les ténèbres pour te posséder ?… Horreur ! Je veux rester près de toi, et ne plus sortir de ce sinistre palais de la nuit. »

2 D’aucuns prétendent que la plus belle chose,
Sur la terre noire, c’est une horde de cavaliers ;
D’autres une armée de fantassins ; d’autres encore une flotte ;
Moi, je dis que c’est ce que l’on aime.
[…]
Comme j’aspire à voir sa démarche charmante
Et l’éclat lumineux de son visage
Plutôt que les chars de Lydie
Ou les fantassins en armes.

3 En fait, la propriété privée est le plus souvent établie par vol, conquête, oppression et autres. Voir par exemple : Brenna Bhandar, Colonial Lives of Property: Law, Land, and Racial Regimes of Ownership (Duke, 2018); David Graeber, Debt: The First 5000 Years (Melville House, 2012); Cedric J. Robinson, Black Marxism (UNC Press, 2005); et Eric Williams, Capitalism and Slavery (Lulu Press, 2005).

4 Voir aussi : Luce deLire: « LEÇONS D’AMOUR, PARTIE I : FLIRTATIONS RÉVOLUTIONNAIRES » Stillpoint Magazine, no. 009, 2021.

5 Pour d’autres exemples, voir : Luce deLire, « Why Dance in the Face of War?, » dans Stillpoint Magazine, no. 010, 2022; « Catchy Title – Gender Abolitionism, Trans Materialism and Beyond, » The Year of The Women Magazine, 2022; et « If You Can Fuck, You Can Dance – The Queer Art of Hospitality, » Lo: Tech: Pop: Cult: Screendance Remixed, dirigé par Priscilla Guy and Alanna Thain (Routledge, 2023, à paraître).

6 Pour une analyse de l’amour-marchandise au-delà de la toxicité, voir Camarade Josephine : « Full Queerocracy Now!: Pink Totalitarianism and the Industrialization of Libidinal Agriculture, » E-Flux Journal, no. 117, Avril. 2021.


Glass, Alice. “Fair Game.” Prey//IV, Eating Glass Records, 2022.

Sappho fr. 16 Voigt, avec les suppléments proposés par Burris, Fish, Obbink (2014, p. 16-17)

Shakespeare, William. ROMÉO ET JULIETTE Tragédie en cinq actes en vers et en prose (1595). Traduction de François-Victor Hugo, 2003.


JOURNEY TO THE UNDERWORLD

Journey to The Underworld draws from self-reflection. The main character seeks to liberate herself as she dives into a dimension where she faces her desires and confronts pleasures she had repressed. Through fiction and myths it presents a story about vulnerability, gender rights, and power structures. The film was made by contributing with three generations of women who are close to the artist. Estrella collaborated with her grandmother, Genia Gabilondo, who composed a song for the video inspired by broken dreams and the consequences of pursuing one’s desires in a context where women struggle to find respect and opportunities. The film was made in Mexico in 2021.

Paola Estrella


LUCE DELIRE writer

Luce deLire est un navire à huit voiles et . Quand la nuit tombe, elle se transforme en philosophe, interprète et théoricienne des médias. Elle aime les arts visuels, les installations et les mises en scènes vidéo. Elle travaille en tant que conservatrice, interprète, metteuse en scène, à planifier et organiser divers évènements. Elle travaille sur et autour de la philosophie des trahisons, de l’infini, de l’athéisme et de la séduction à travers diverses disciplines et médias. Luce a écrit Leçons d’Amour 1 : Flirtations Révolutionnaires pour le numéro 9 « Tender » de Stillpoint. Elle a aussi écrit Why Dance in The Face of War pour le numéro 10 « Juge. »

PAOLA ESTRELLA artist

Paola Estrella est une artiste multimédia née à Mexico et vivant à Londres. Auto-fiction et découverte du soi sont les fondamentaux de sa pratique artistique, à travers lesquels elle exprime les notions d’intimité, désir et devenir. Estrella explore comment les nouvelles technologies impactent le public et les sphères privées et réfléchit à comment l’imaginaire influence les conventions sociales, le genre, l’identité et notre notion de réalité. Son travail s’étend à travers les médias mixtes, la vidéo, les installations et les performances où elle se penche sur les limites floues entre monde extérieur et intérieur. Elle a un master en Art Contemporain du Royal College of Art et a étudié direction artistique et médias mixtes à Central Saint Martins. Le travail d’Estrella a été exposé à l’international. Elle a été sélectionnée pour les New Contemporaries en 2022 et sélectionnée pour les prix Lumen et Hari Art. L’association CW+ lui a passé commande pour son exposition “Journeys: The Healing Arts” à la galerie Saatchi, sélectionné pour le prix Lumen et exposé au Musée de Mexico en 2021. Elle a remporté le programme Travers Smith CSR 2021-2022. Elle a été sélectionnée par la galerie White Cube pour Tomorrow :London et a reçu une bourse soutenue par la fondation Villiers David et RCA en 2020.

JOURNEY TO THE UNDERWORLD (2021) 10:13min:
Mise en scène by: Paola Estrella
Direction artistique: Paola Estrella
Costumes: Gabrielle Venguer
Assistants de direction: Karla Estrella y Gabrielle Venger
Eclairage et image: Paola Estrella
Danseuse: Natalia Harrigan
Musique pour les danseurs: Molly Meet
Sorcières: Karla Estrella, Laura Contreras, Gabrielle Venguer
Tarot: Wandering Oracle
Serveurs: Eduardo Vinssac e Iker Orozco
Barbe Bleue: Emilio Cuaik
Illustrations: Emilio Cuaik
Lilith: Daniela Gerdes
Chanteuse: Genia Gabilondo
Composition musicale: Genia Gabilondo
Traductions: Iker Orozco

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